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Réunion des Musées nationaux - Grand Palais - Catalogue des collections
Musée national du Moyen Age, Thermes et Hôtel de Cluny, Paris

Les catalogues raisonnés

Sculptures des XIe-XIIIe siècle - Collections du musée de Cluny

Œuvres redatées, Espagne

Cl. 23297

Masque d’applique : tête d’homme barbu

Monde hispanique, xviie siècle (?)

Sureau noir
H. 17 ; L. 10 ; Pr. 4,7 cm


Historique

Donné par Guy Ladrière au musée de Cluny en 1987. Déposé au musée Goya de Castres (comité du 30 juin 2003, arrêté du 15 juillet 2003).

Études et restaurations

Étude xylologique par Élisabeth Ravaud pour le Laboratoire de recherche des musées de France en 1996.


Commentaire

De petites dimensions, ce masque d’applique figure la tête d’un homme barbu. De part et d’autre d’un axe central ouvert, présentant en sa base deux petits trous – probables traces d’un ancien système de fixation d’un ornement, peut-être orfévré, aujourd’hui disparu –, les cheveux retombent, formant des mèches parallèles terminées par des bouclettes en spirales remontantes. Sous cette couronne de cheveux, le front, de dimensions moyennes, est souligné de larges trous – témoignage de la présence d’yeux anciennement incrustés. Les oreilles sont fort endommagées, la gauche ayant pratiquement disparu, tandis que seul le lobe subsiste pour la droite. Le nez, aigu, est usé en son extrémité. Sous une moustache courte, taillée de façon rectiligne, la bouche est droite, serrée, avec une forte dépression au milieu de la lèvre supérieure. La barbe, qui mange en partie des joues creuses, aux pommettes saillantes, est formée de longues mèches terminées, au centre, en spirales et, sur les côtés, de façon rectiligne. L’essentiel de la partie inférieure de cette barbe a disparu sur le côté gauche. Au revers, l’œuvre présente un pan vertical, percé de deux trous en son sommet qui ne semblent pas correspondre aux deux trous du front, et de deux ouvertures en cône correspondant à l’emplacement des yeux.

La datation de cette œuvre est particulièrement problématique. Lors de son entrée dans les collections du musée, elle était considérée comme datant du xiie siècle. Plusieurs éléments plaident en défaveur de cette thèse. Le premier est celui du matériau. Une analyse menée en 1996 par le Laboratoire de recherche des musées de France a permis d’identifier l’essence comme étant du sureau noir. Le fait que l’on ne connaisse pas d’autre exemple d’œuvres médiévales sculptées dans ce bois, sans permettre d’infirmer la datation, incite cependant à douter. Les critères stylistiques ne sont guère plus favorables. La disposition des cheveux, tombant en boucles, rappelle en effet certaines œuvres du milieu du xiie siècle, ne serait-ce que la tête du tombeau d’Ogier le Danois (musée Bossuet de Meaux) ou celle de Lothaire (musée Saint-Remi de Reims). Outre la nature différente des mèches, constituées de réunions de fins cheveux en bandeau et non, comme sur ce masque, de masses plus épaisses formant rubans, leur disposition contraste, tombant plus bas sur le front et encadrant le visage au lieu de le barrer d’une ligne presque droite comme ici. La forme de la moustache pose également problème : la pilosité centrale n’est pas ici ramassée en deux mèches retombant de part et d’autre de la bouche, mais en une série de petits rubans sommant la lèvre supérieure. Quant à la structure de l’œuvre, elle soulève des interrogations : si l’on connaît d’autres exemples de figures de bois processionnelles ou d’applique (telle une tête française du Bayerisches Nationalmuseum de Munich, inv. no 76/54), aucune, semble-t-il, ne présentait un décor analogue à la nôtre. Outre les yeux incrustés, il faut en effet probablement imaginé une coiffe d’orfèvrerie, dont ne restent aujourd’hui que les deux trous d’attache. Quant aux yeux, leur largeur particulièrement imposante devait donner une forte violence au regard, que n’adoucit aucune paupière, au contraire des pratiques les plus fréquentes de la sculpture du xiie siècle.

Si l’on rejette l’inscription de cette œuvre dans le xiie siècle, il n’en faut pas moins la situer géographiquement et chronologiquement. Par-delà les yeux, l’arrête du nez, la moustache soulignant la bouche, les lèvres serrées et surtout les pommettes hautes sur des joues creusées donnent à l’œuvre un réalisme dur et une force expressive qui, nous semble-t-il, rappellent davantage la violence crue de la sculpture pratiquée dans l’Espagne et dans ses colonies à la fin du Siècle d’or. Le fait que, vues au revers, les cavités des yeux semblent avoir permis une animation du regard paraît à ce titre renforcer cette hypothèse.


Bibliographie

  • Xavier Dectot, Musée national du Moyen Âge – Thermes de Cluny, Catalogue, Sculptures des xie-xiie siècles. Roman et premier art gothique, Paris, RMN, 2005, no 208.

Index

Désignation : Masque d’applique
Matière : Sureau noir
Technique : Sculpture
Sujets iconographiques : Homme ; Masque
Période : XVIIe siècle


Permalien pour cette notice

http://www.sculpturesmedievales-cluny.fr/notices/notice.php?id=1208



Xavier Dectot

© Réunion des musées nationaux – Grand Palais, 2011 ; mise à jour : mai 2016

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