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L’érection de la façade du bras sud constitue la dernière étape des travaux du transept qui bouleversèrent profondément la physionomie de la cathédrale parisienne. Comme pour le bras nord, bien peu de documents nous sont parvenus pour nous permettre de reconstituer son histoire ou même sa structure iconographique exacte.
Deux éléments, cependant, permettent d’apporter un minimum de précisions sur l’histoire du chantier. Le premier est une inscription qui court sur les soubassements du flanc sud, de part et d’autre des ébrasements du portail :
ANNO DOMINI MCCLVII, MENSE FEBRUARIO, IDUS SECUNDO, HOC FUIT INVENTUM CHRISTI GENETRICIS HONORE KALLENSI LATHOMO VIVENTE JOHANNE MAGISTRO
Le 12 février 1258, ce bâtiment fut commencé en l’honneur de la mère du Christ, Jean de Chelles, alors vivant, étant maître maçon.
D’aucuns en ont déduit que Jean de Chelles était l’architecte du bras sud du transept, en négligeant pourtant un aspect essentiel de l’inscription : la construction en ablatif absolu et l’utilisation de vivente marquent clairement que l’inscription commémore effectivement la fondation du bras sud du transept (on dirait aujourd’hui « la pose de la première pierre »), mais aussi qu’au moment de son apposition sur le mur, Jean de Chelles n’est plus vivant. Si l’on ne peut exclure qu’elle ait été placée dans un second temps, il semble néanmoins plus probable que ce soit par un nouvel architecte au moment où ce dernier reprenait le chantier après le décès de son prédécesseur – d’autant que les différences de conception entre l’un et l’autre bras du transept sont considérables.
Un autre texte, une charte cette fois-ci, nous renseigne presque par accident sur le nom de ce second architecte. Un document des Archives nationales, daté de 1265, qualifie en effet Pierre de Montreuil de « maître des œuvres de Notre-Dame de Paris1 ». Celui-ci, tout en respectant l’équilibre général établi par Jean de Chelles au bras nord du transept, y insère un répertoire nouveau, sensible tant dans le fin graphisme des arcatures aveugles que dans le dessin ambitieux de la rose et des baies ajourées qui la supportent.
Comme pour le bras nord du transept, bien peu de documents figurés nous sont parvenus ; aussi faut-il se reporter aux descriptions des historiens de Paris, qui ne sont guère plus nombreuses, et tout particulièrement à l’abbé Lebeuf2, pour en saisir l’iconographie. Le tympan, conservé, est consacré à saint Étienne, sous la vocation duquel était placée la cathédrale précédente, et entouré, aux voussures, de figuration des anges, des martyrs et des confesseurs. Au trumeau se trouvait, comme il se doit, une statue du protomartyr, tandis qu’aux ébrasements se seraient tenus des apôtres. Enfin, sur les retours des piédroits avaient été placés à l’est, saint Marcel et saint Germain, et, à l’ouest, leur prédécesseur à l’évêché parisien, saint Denis, entouré de ses deux disciples Rustique et Éleuthère. Douze des corps de ces treize statues furent retrouvés en 18393, le treizième ayant réapparu lors des découvertes de 1977. À ces sculptures aujourd’hui retrouvées, il faut ajouter un Moïse et un Aaron, placés dans des niches en hauteur, au-dessus de la claire-voie, et qui se trouvent toujours en place aujourd’hui ; d’autres, dont l’iconographie nous échappe, ont disparu dès avant la Révolution, notamment les huit statues du flanc sud, entre les chapelles du chœur.
Du décor intérieur médiéval de Notre-Dame ne reste aujourd’hui en place que la clôture de chœur, privée, depuis les travaux de Robert de Cotte au xviie siècle, du jubé dont subsistent quelques fragments au musée du Louvre4. La clôture n’était pas le seul des grands ensembles sculptés mis en place au xiiie siècle : en effet, au revers de la façade du bras sud, lui répondait une grande composition, placée entre les gâbles des portails, où Adam et Ève encadraient des anges, les uns porteurs d’instruments de la Passion, les autres sonnant de la trompe, et, au centre un Christ du Jugement dernier. De cet ensemble, seul subsiste aujourd’hui l’Adam du musée de Cluny, probablement le plus beau nu de l’époque gothique.
1. Arch. nat., S 4070, no 25 : Petrus de Mostreleio, magister operum b. Mariæ Parisiensis. Publié dans Ste12, p. 15-16 et cité par Gro64, p. 270.
2. Abbé J. Lebeuf, Histoire de la ville et de tout le diocèse de Paris, Paris, Cocheris éd., 1863, t. I, p. 9.
3. Arthur Nouail de Lavillegille, Adrien de Longpérier et Gilbert , « Rapport sur les statues du Moyen Âge découvertes à Paris, rue de la Santé en décembre 1839 », Mémoires et dissertations sur les antiquités nationales et étrangères publiés par la Société royale des antiquaires de France, V, 1840. Il est à noter que, contrairement à ce que crurent ces auteurs, le treizième corps alors découvert ne provenait pas de ce portail mais de celui du bras nord. Quant à la tête qui fut alors également découverte, elle provient du portail du Couronnement de la façade occidentale.
4. RF 991, RF 995, RF 1002 a et RF 1002 b (Bar95, p. 91-92).
Xavier Dectot
© Réunion des musées nationaux – Grand Palais, 2011 ; mise à jour : mai 2016